L’Inde veut nourrir gratuitement 800 millions de personnes
Distribuer chaque mois de la nourriture gratuite à 800 millions de personnes : c’est l’ambition de la loi sur la sécurité alimentaire que vient d’adopter le gouvernement indien. Le texte prévoit que les trois quarts des habitants des campagnes et la moitié de ceux des villes recevront chaque mois cinq kilos de riz ou de blé, quasiment gratuitement. Des mesures complémentaires prévoient la distribution de trente-cinq kilos pour les familles les plus pauvres, des allocations pour les femmes enceintes et les jeunes mères, et la distribution de repas aux enfants. La distribution des aliments sera assurée par le système public de distribution, qui dispose d’implantations partout dans le pays.

Ce texte à la portée considérable a été adopté la semaine dernière par le gouvernement, sous la forme d’une ordonnance. Un choix surprenant qui montre la volonté de l’équipe au pouvoir de ne pas attendre la prochaine session parlementaire, en août.

Enjeu politique énorme

L’enjeu politique est énorme : des élections générales auront lieu, au printemps prochain au plus tard, et le Parti du Congrès, au pouvoir, voit dans cette initiative sa meilleure chance de séduire les électeurs populaires. Le texte devra, malgré tout, être confirmé par le Parlement, mais le Congrès joue sur le fait que l’opposition n’osera pas repousser une mesure censée aider les Indiens les plus pauvres.

Cette loi sur la sécurité alimentaire vise à traiter le problème de la faim, qui demeure très important en Inde . Au-delà des 200 à 300 millions de personnes très nettement sous-alimentées, le pays en compte, également, des centaines de millions mal alimentées, avec des répercussions graves en termes de santé, de développement et d’éducation. Les spécialistes de la pauvreté, le prix Nobel d’économie (1998) Amartya Sen en tête, faisaient donc campagne depuis des années pour un tel programme massif.

Le projet pose, malgré tout, de nombreuses questions sur l’organisation des achats, l’impact sur la production agricole indienne, etc. La capacité du système de distribution à prendre en charge l’opération est douteuse, d’autant que, dans son fonctionnement actuel, il fait l’objet de très gros détournements. L’identification correcte des bénéficiaires sera à cet égard cruciale. Nombre d’experts estiment que la distribution de riz et de blé n’est pas non plus la solution la plus adaptée, alors que les Indiens manquent surtout d’une alimentation plus riche en légumes, fruits et viande.

Enfin, les critiques s’inquiètent du coût du programme, évalué à 17 milliards d’euros (même si une grosse partie viendra du recyclage de dispositifs existants). « Dans la situation économique actuelle, le gouvernement ne peut pas se permettre de laisser compromettre le programme de maîtrise du déficit budgétaire », s’inquiète l’organisation patronale CII.

Lire sur le site de jeunecitoyen.wordpress.com (07/08/2013)