Réparations pour l'esclavage, ça bouge...
Les effets de la conférence mondiale contre le racisme réunie à Durban en septembre 2001 et du forum des ONG continuent à se faire sentir. La lutte pour obtenir réparation pour les conséquences de l'esclavage s'est accélérée en 2013.

Tout d'abord à la Caraïbe. L'affaire a été relancée, en juillet, à l'issue du sommet du Caricom,  composé essentiellement d’États anglophones auxquels s'est joint, par la suite, le Surinam, ancienne colonie néerlandaise, et Haïti (2002) pour la partie francophone. Une commission des réparations réunissant universitaires, économistes et avocats des États membres a été mise sur pied, le 17 septembre, à l'issue d'une conférence réunie à Kingston, la capitale de Saint-Vincent-et-les- Grenadines.

«L'esclavage et le colonialisme dans les Caraïbes ont très durement altéré nos options de développement» a expliqué à cette occasion Baldwin Spencer, le Premier ministre d'Antigua-et-Barbuda, dénonçant la dépendance économique, culturelle, sociale et même politique née de cette situation. «Les nations européennes qui se sont consacrées à la conquête, la colonisation, au génocide et à l'esclavage doivent fournir les moyens requis pour réparer l'héritage actuel de leurs dommages historiques», estime Ralph Gonsalves, Premier ministre de Saint-Vincent.

Sont principalement visés la Grande-Bretagne, la France et les Pays-Bas. Au cas où ces derniers n'accepteraient pas de s'asseoir autour d'une table pour discuter compensations économiques, le Caricom menace de porter le dossier devant la Cour internationale de justice. D'ores et déjà, le cabinet d'avocats britannique Leigh Day & Co a été choisi comme conseil. C'est ce même cabinet qui avait contraint Londres, en juin 2013, à présenter ses «regrets» et à indemniser les descendants et les rares survivants des quelque 5000 rebelles de la guerilla Mau Mau torturés par les troupes britanniques au Kenya dans les années 1950.

A la Martinique, en 2005, à l'initiative du MIR de Garcin Malsa, le Mouvement International pour les Réparations, le Conseil Mondial de la Diaspora Panafricaine et 64 descendants d'esclaves ont intenté une action en réparation contre l’État français, sur la base de la loi Taubira de 2001 qui reconnaît l'esclavage et la traite négrière comme un crime contre l'humanité. Le 12 novembre 2013, soit après 5 années de patience active, ce procès lancé a connu sa première audience. Le jugement de cette audience a été mis en délibéré en mars 2014.

A Maurice, en 2009, une commission Justice et Vérité avait été mise sur pied, visant à mettre à jour les effets de l'esclavage et de l''engagisme' (des travailleurs indiens) sur l'île. Cette commission a rendu ses conclusions fin 2011, démontrant les nombreuses spoliations.
Le mouvement pour les réparations, essentiellement composé des Verts fraternels (dont le responsable Sylvio Michel a fait une grève de la faim de 26 jours fin 2013) et du parti Lalit, a avancé deux revendications principales issues des conclusions de cette commission:
    ⁃    que les bénéficiaires locaux et les anciennes puissances coloniales soient contraints à contribuer à la mise en place d'un fonds d'aide, la Green Reparation Foundation.
    ⁃    que le gouvernement demande au judiciaire d'instituer une Land Court chargée des litiges sur les dépossessions de terre depuis le XIX° siècle.
Comme partout ailleurs les propriétaires des anciens esclaves furent dédommagés financièrement et la première banque de Maurice, The Mauritius Commercial Bank, a été fondée par des fonds provenant de cette compensation.

Enfin, rappelons qu'en France, en mai 2013, le Comité représentatif des associations noires de France (Cran) a assigné en justice la Caisse des dépôts et consignations (CDC) pour complicité de crime contre l’humanité, pour avoir tiré profit de la fin de l’esclavage et de l’indépendance de Haïti.