05 Juin 2016
Quinze anciens militaires ont été condamnés, vendredi 27 mai, par la justice argentine pour leur participation à l’opération Condor. Parmi eux, le dernier dictateur du pays, Reynaldo Bignone (1982-1983), 88 ans, s’est vu infliger une peine de vingt ans de prison. Cette opération, menée par six dictatures sud-américaines dans les années 1970, avait pour objectif d’éliminer les opposants politiques. A l’époque, l’Argentine, le Chili, l’Uruguay, le Paraguay, la Bolivie et le Brésil avaient uni leurs forces pour pourchasser les militants de gauche hostiles à leurs régimes.
Selon un document versé au dossier d’accusation, les Etats-Unis connaissaient l’existence de ce dispositif. Voyant dans ce plan un rempart face à l’avancée des idées socialistes et communistes, dans un contexte de guerre froide, Washington ne s’y est pas opposé. Le secrétaire d’Etat, Henry Kissinger, a ainsi répondu à un ministre argentin qui l’informait de l’opération :
« S’il y a des choses qui doivent être faites, faites-les rapidement. Mais vous devez reprendre rapidement les procédures normales. »
Une organisation criminelle
L’Argentine est le seul pays d’Amérique latine a avoir entrepris de traduire en justice les personnes impliquées dans ce dispositif. Des centaines d’ex-militaires ont ainsi été jugés au cours des dix dernières années dans le cadre de ce « Nuremberg de la dictature ». Cependant, c’est la première fois qu’un procès est consacré à l’opération Condor en tant qu’organisation criminelle.
La plupart des accusés ont été condamnés pour le délit de crime en bande organisé, à l’issue de trois ans d’audiences. Ils n’étaient pas présents dans la salle lors de la lecture du jugement. A début de la procédure, en février 2013, ils étaient 25 mis en cause. Ils ne sont plus que 17 en vie, âgés de 77 à 92 ans. Huit sont morts durant le procès, notamment l’ancien dictateur argentin Jorge Videla (1976-1981), mort dans sa prison.
Parmi les 105 victimes recensées lors de cette procédure, 45 étaient uruguayennes, 22 chiliennes, 13 paraguayennes, 11 boliviennes et 14 argentines. La plupart des exécutions ou enlèvements ont été perpétrés en Argentine, où de nombreux militants ayant fui leur pays vivaient comme réfugiés politiques.
« Système criminel et institutionnalisé »
Le verdict a été accueilli par des applaudissements dans la salle d’audience du tribunal de Buenos Aires. « Ce procès est un exemple. L’Argentine démontre qu’il est possible » de juger les responsables de la dictature, a estimé Nora Cortinas, une des fondatrices des Mères de la place de Mai, organisation emblématique de la lutte contre la junte militaire dans le pays.
Pour de nombreux pays latino-américains, ces condamnations sont « un évènement judiciaire important », souligne Luz Palmas, l’avocate du Centre d’études légales et sociales (CELS), organisation non gouvernementale argentine défendant les droits de l’homme et représentant les intérêts des familles de victimes.
« C’est le premier procès qui établit ce qu’on sait depuis des dizaines d’années : l’existence d’un plan criminel qui a été le plan Condor (…), un système criminel et institutionnalisé. »
Dans les autres pays du continent, les anciens militaires ont généralement bénéficié de lois d’amnistie, à quelques exceptions près. Environ 300 témoins ont été appelés à la barre durant les trois ans du procès. Les magistrats se sont appuyés sur ce que l’on appelle les « Archives de la terreur », découvertes au Paraguay dans les années 1990, et sur des documents déclassifiés par les Etats-Unis. Si leur pays d’origine avait accepté les demandes d’extradition de l’Argentine, le nombre des accusés aurait été supérieur.
A lire sur le site de lemonde.fr (28/05/2016)
Selon un document versé au dossier d’accusation, les Etats-Unis connaissaient l’existence de ce dispositif. Voyant dans ce plan un rempart face à l’avancée des idées socialistes et communistes, dans un contexte de guerre froide, Washington ne s’y est pas opposé. Le secrétaire d’Etat, Henry Kissinger, a ainsi répondu à un ministre argentin qui l’informait de l’opération :
« S’il y a des choses qui doivent être faites, faites-les rapidement. Mais vous devez reprendre rapidement les procédures normales. »
Une organisation criminelle
L’Argentine est le seul pays d’Amérique latine a avoir entrepris de traduire en justice les personnes impliquées dans ce dispositif. Des centaines d’ex-militaires ont ainsi été jugés au cours des dix dernières années dans le cadre de ce « Nuremberg de la dictature ». Cependant, c’est la première fois qu’un procès est consacré à l’opération Condor en tant qu’organisation criminelle.
La plupart des accusés ont été condamnés pour le délit de crime en bande organisé, à l’issue de trois ans d’audiences. Ils n’étaient pas présents dans la salle lors de la lecture du jugement. A début de la procédure, en février 2013, ils étaient 25 mis en cause. Ils ne sont plus que 17 en vie, âgés de 77 à 92 ans. Huit sont morts durant le procès, notamment l’ancien dictateur argentin Jorge Videla (1976-1981), mort dans sa prison.
Parmi les 105 victimes recensées lors de cette procédure, 45 étaient uruguayennes, 22 chiliennes, 13 paraguayennes, 11 boliviennes et 14 argentines. La plupart des exécutions ou enlèvements ont été perpétrés en Argentine, où de nombreux militants ayant fui leur pays vivaient comme réfugiés politiques.
« Système criminel et institutionnalisé »
Le verdict a été accueilli par des applaudissements dans la salle d’audience du tribunal de Buenos Aires. « Ce procès est un exemple. L’Argentine démontre qu’il est possible » de juger les responsables de la dictature, a estimé Nora Cortinas, une des fondatrices des Mères de la place de Mai, organisation emblématique de la lutte contre la junte militaire dans le pays.
Pour de nombreux pays latino-américains, ces condamnations sont « un évènement judiciaire important », souligne Luz Palmas, l’avocate du Centre d’études légales et sociales (CELS), organisation non gouvernementale argentine défendant les droits de l’homme et représentant les intérêts des familles de victimes.
« C’est le premier procès qui établit ce qu’on sait depuis des dizaines d’années : l’existence d’un plan criminel qui a été le plan Condor (…), un système criminel et institutionnalisé. »
Dans les autres pays du continent, les anciens militaires ont généralement bénéficié de lois d’amnistie, à quelques exceptions près. Environ 300 témoins ont été appelés à la barre durant les trois ans du procès. Les magistrats se sont appuyés sur ce que l’on appelle les « Archives de la terreur », découvertes au Paraguay dans les années 1990, et sur des documents déclassifiés par les Etats-Unis. Si leur pays d’origine avait accepté les demandes d’extradition de l’Argentine, le nombre des accusés aurait été supérieur.
A lire sur le site de lemonde.fr (28/05/2016)