08 Sept 2024
Le Brésil, qui préside le G20 cette année, avait annoncé un communiqué « sans précédent » à l’issue de la réunion des ministres des Finances et des banquiers centraux des principales économies mondiales à Rio, jeudi et vendredi. C’est que le sujet dominant de ce sommet destiné à préparer la réunion entre chefs d’Etat et de gouvernement des 18 et 19 novembre prochain était effectivement aussi brûlant que clivant : faire contribuer les plus riches en les taxant davantage.
Au final, non, les ministres présents ne se sont pas entendus sur un impôt mondial pour les milliardaires mais un compromis a été avancé à l’issue des travaux. On peut lire, entre autres, dans une déclaration sur « la coopération fiscale internationale », publiée vendredi en soirée, que « dans le plein respect de la souveraineté fiscale, nous nous efforcerons de coopérer pour faire en sorte que les personnes très fortunées soient effectivement imposées ». Le texte souligne également que « les inégalités de richesse et de revenu compromettent la croissance économique et la cohésion sociale et aggravent les vulnérabilités sociales », et prône des « politiques fiscales efficaces, équitables et progressives ».
Fernando Haddad, le ministre brésilien des Finances, a souligné que « du point de vue moral, c’est quelque chose d’important que les vingt nations les plus riches considèrent que nous avons un problème qui est d’avoir une fiscalité progressive sur les pauvres et non sur les riches ». Outre le Brésil, la France, l’Afrique du Sud, l’Espagne et l’Union africaine soutenaient une taxation internationale des super-riches.
Mais les Etats-Unis ont rejeté (sans surprise) des négociations internationales sur le sujet : s’ils souhaitent que les plus riches paient leur juste part, ils considèrent que la fiscalité est d’abord l’affaire de chaque pays. L’Allemagne s’est également ouvertement opposée à un tel processus.
FMI et ONG applaudissent
Preuve que l’idée lancée par le Brésil a fait malgré tout son bonhomme de chemin : la pluie de réactions qui a suivi la conférence de presse vendredi soir. Présente à Rio, la directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), Kristalina Georgieva, a salué la position du G20 en faveur de la « justice fiscale », jugeant « opportune et bienvenue » la décision de coopérer en vue d’imposer les plus riches.
L’ONG Greenpeace a qualifié le consensus d’« historique », précisant qu’« il s’agit d’une étape importante pour le G20 qui reconnaît pour la première fois la nécessité de taxer les super-riches ». Oxfam International, qui a publié jeudi son traditionnel rapport sur la croissance des inégalités dans le monde, estime que l’annonce est un « progrès mondial considérable » et appelle les dirigeants du G20 « à mettre en place un processus véritablement démocratique pour fixer des normes mondiales sur la taxation des ultra-riches» et « à ne pas confier cette tâche à l’OCDE (Organisation de développement et de coopération économique) ».
Un premier pas vers le changement
Auteur d’un rapport sur la faisabilité d’un tel impôt global à la demande du Brésil, l’économiste français Gabriel Zucman se réjouit que « pour la première fois dans l’histoire, les pays du G20 s’accordent à dire que la manière dont nous taxons les super-riches doit être modifiée ».
Dans un entretien accordé au Soir à la veille du meeting brésilien, ce spécialiste des inégalités détaillait sa proposition – soit un impôt de 2 % sur la fortune de 3.000 milliardaires qui rapporterait entre 200 et 250 milliards d’euros par an : « Ce taux permettrait de s’assurer que les ultra-riches payent au moins autant, proportionnellement à leur capacité contributive, que les classes moyennes et les classes populaires. C’est une norme a minima et une proposition en réalité très modeste. » Précisant que si l’idéal est que tous les pays acceptent cette norme minimale, cela n’est pas nécessaire.
« La preuve : les Etats-Unis n’ont pas ratifié l’impôt minimum coordonné de 15 % sur les profits des sociétés multinationales ; il va pourtant être appliqué, y compris aux multinationales américaines. Pourquoi ? Parce que l’accord permet aux pays qui appliquent cet impôt minimum d’agir comme “collecteur fiscal en dernier ressort” en surtaxant les multinationales dont le siège est situé dans des pays qui ne l’appliquent pas. Il suffirait d’adopter une approche similaire pour l’impôt minimum des ultra-riches – ce qui est possible puisque les grandes entreprises dont ils sont actionnaires sont présentes dans de nombreux pays. »
Le soir - 28/07/2024
Au final, non, les ministres présents ne se sont pas entendus sur un impôt mondial pour les milliardaires mais un compromis a été avancé à l’issue des travaux. On peut lire, entre autres, dans une déclaration sur « la coopération fiscale internationale », publiée vendredi en soirée, que « dans le plein respect de la souveraineté fiscale, nous nous efforcerons de coopérer pour faire en sorte que les personnes très fortunées soient effectivement imposées ». Le texte souligne également que « les inégalités de richesse et de revenu compromettent la croissance économique et la cohésion sociale et aggravent les vulnérabilités sociales », et prône des « politiques fiscales efficaces, équitables et progressives ».
Fernando Haddad, le ministre brésilien des Finances, a souligné que « du point de vue moral, c’est quelque chose d’important que les vingt nations les plus riches considèrent que nous avons un problème qui est d’avoir une fiscalité progressive sur les pauvres et non sur les riches ». Outre le Brésil, la France, l’Afrique du Sud, l’Espagne et l’Union africaine soutenaient une taxation internationale des super-riches.
Mais les Etats-Unis ont rejeté (sans surprise) des négociations internationales sur le sujet : s’ils souhaitent que les plus riches paient leur juste part, ils considèrent que la fiscalité est d’abord l’affaire de chaque pays. L’Allemagne s’est également ouvertement opposée à un tel processus.
FMI et ONG applaudissent
Preuve que l’idée lancée par le Brésil a fait malgré tout son bonhomme de chemin : la pluie de réactions qui a suivi la conférence de presse vendredi soir. Présente à Rio, la directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), Kristalina Georgieva, a salué la position du G20 en faveur de la « justice fiscale », jugeant « opportune et bienvenue » la décision de coopérer en vue d’imposer les plus riches.
L’ONG Greenpeace a qualifié le consensus d’« historique », précisant qu’« il s’agit d’une étape importante pour le G20 qui reconnaît pour la première fois la nécessité de taxer les super-riches ». Oxfam International, qui a publié jeudi son traditionnel rapport sur la croissance des inégalités dans le monde, estime que l’annonce est un « progrès mondial considérable » et appelle les dirigeants du G20 « à mettre en place un processus véritablement démocratique pour fixer des normes mondiales sur la taxation des ultra-riches» et « à ne pas confier cette tâche à l’OCDE (Organisation de développement et de coopération économique) ».
Un premier pas vers le changement
Auteur d’un rapport sur la faisabilité d’un tel impôt global à la demande du Brésil, l’économiste français Gabriel Zucman se réjouit que « pour la première fois dans l’histoire, les pays du G20 s’accordent à dire que la manière dont nous taxons les super-riches doit être modifiée ».
Dans un entretien accordé au Soir à la veille du meeting brésilien, ce spécialiste des inégalités détaillait sa proposition – soit un impôt de 2 % sur la fortune de 3.000 milliardaires qui rapporterait entre 200 et 250 milliards d’euros par an : « Ce taux permettrait de s’assurer que les ultra-riches payent au moins autant, proportionnellement à leur capacité contributive, que les classes moyennes et les classes populaires. C’est une norme a minima et une proposition en réalité très modeste. » Précisant que si l’idéal est que tous les pays acceptent cette norme minimale, cela n’est pas nécessaire.
« La preuve : les Etats-Unis n’ont pas ratifié l’impôt minimum coordonné de 15 % sur les profits des sociétés multinationales ; il va pourtant être appliqué, y compris aux multinationales américaines. Pourquoi ? Parce que l’accord permet aux pays qui appliquent cet impôt minimum d’agir comme “collecteur fiscal en dernier ressort” en surtaxant les multinationales dont le siège est situé dans des pays qui ne l’appliquent pas. Il suffirait d’adopter une approche similaire pour l’impôt minimum des ultra-riches – ce qui est possible puisque les grandes entreprises dont ils sont actionnaires sont présentes dans de nombreux pays. »
Le soir - 28/07/2024