28 Août 2014
Centrale solaire, agriculture bio, monnaie locale... Dans le sillage du mouvement des villes en transition, cette commune alsacienne veut atteindre l’autonomie énergétique et alimentaire.
«Les employés communaux y arrachent les mauvaises herbes à la main et un attelage sert de ramassage scolaire.» Danièle Fritsch, la cinquantaine, a posé ses cartons à Ungersheim il y a deux ans et n’est pas prête d’oublier ses premières impressions.
Penser écologie, réaliser économie
Peuplé de 2087 habitants, ce village près de Mulhouse, ressemble à tous ceux du péri-urbain alsacien. Des maisons avec jardins, une salle de sport, une place centrale où trône l’église. Il faut y vivre pour se rendre compte qu’Ungersheim n’est pas un village comme les autres.
Depuis 2011, la commune suit le mouvement des villes en transition. Elle a défini vingt-et-un projets pour penser «l’après-pétrole». Ils s’appuient sur trois piliers de réflexion avec pour maître mot l’«autonomie» : alimentaire, énergétique et intellectuelle.
Dernière réalisation en date : une centrale photovoltaïque avec quarante mille mètres carré de capteurs solaires. De quoi produire en électricité l’équivalent de ce que consomment dix-mille habitants par an. Ungersheim a su profiter de la mise en vente des friches industrielles des anciennes mines de potasse pour acquérir le terrain sur lequel une entreprise privée investit.
La commune bénéficie du loyer payé par l’investisseur. À Ungersheim, l’écologie accompagne les projets d’avenirs. «Je pense écologie, je réalise économie», se targue le maire Jean-Claude Mensch.
Un méthaniseur devrait à l’avenir compléter l’installation énergétique alors que la piscine municipale chauffe déjà ses bassins au solaire thermique. Affichée mais pas véritablement recherchée, l’autonomie énergétique est un prétexte pour faire du village une «vitrine des énergies renouvelables» selon le maire. À une vingtaine de kilomètres de la plus vieille centrale nucléaire de France, Fessenheim, il ne prétend pas «révolutionner le monde mais ouvrir des voies».
Bio et local
Ouvrir la voie, Richelieu le fait concrètement tous les jours. Le cheval de la commune est un employé municipal comme les autres : il aide à arroser les fleurs, labourer le jardin communal et sert de transport scolaire. «C’est un moyen de sensibilisation essentiel», explique Jean-Claude Mensch.
Pas de progrès sans pédagogie. Les enfants scolarisés à Ungersheim mangent bio à la cantine. La filière appelée «de la graine à l’assiette» crée un circuit local d’approvisionnement alimentaire. Le jardin communal alimente aussi des paniers de légumes bio accessibles à toute la population.
À la mairie, un large plan trace l’architecture de la future Maison des natures et des cultures. En forme d’hémicycle, «le bâtiment sera équipé d’une conserverie et d’une malterie», décrit le maire «et aussi d’un lieu d’activités pédagogiques».
Un tel projet ne se monte pas facilement : «Les caractéristiques du projet ne rentrent pas dans les cases des dossiers de subvention», déplore Jean-Claude Mensch. En lieu de mixité sociale et générationnelle, ce projet est emblématique d’une des priorités du village en transition : «Créer du lien», insiste le maire.
«Le village comptait sept restaurants pour 1200 âmes, se souvient-t-il. Avec plus de 2000 habitants aujourd’hui, il n’en compte plus que trois.» «Face à la proche zone commerciale, les petits commerçants ne peuvent pas résister», témoigne Jacques, gérant d’un bar-restaurant. La quincaillerie sur la place centrale du village a aussi disparu.
Une idée pour relocaliser l’économie ? Le «radis», une monnaie locale. Lancée le 13 juillet dernier, elle permet aux habitants d’Ungersheim de payer leurs achats dans neuf commerces du village qui l’ont adoptée. Trois radis dans la caisse de la boulangère, une dizaine dans celle de la coiffeuse... «Il n’y a pas un engouement fou mais ça participe de la sensibilisation pour la relocalisation», concède Jean-Claude Mensch.
Démocratie participative
En relocalisant l’économie, le maire souhaite renforcer les liens sociaux au sein de sa commune, «où l’esprit de solidarité manque», d’après Carole, la coiffeuse. Le projet d’éco-hameau, qui devrait aboutir d’ici deux ans, incarne ce souhait. Il regroupe des personnes volontaires pour financer et concevoir ensemble une habitation écologique.
«Les idées doivent émaner de la population», souligne le maire. Il a pour cela introduit un conseil participatif. Une quarantaine d’Ungersheimois auxquels le conseil municipal soumet ses propositions. «C’est peu, sur 2000 habitants, mais ça a le mérite d’exister», souligne le maire.
«Il faut être volontaire, rien n’est obligatoire», fait remarquer Julien Rousseau, au conseil municipal depuis six ans. A 33 ans, le conseiller reconnaît que les moins de vingt ans manquent au conseil. Pas besoin non plus d’appartenir à un parti politique. Ni l’opposition ni le maire ne portent d’étiquette.
«L’écologie politique n’est pas assez pragmatique», regrette-t-il avant d’afficher sa priorité : «Améliorer la vie de la population dans un environnement sain.»
Par Marion Paquet (WE Demain) - 25 juillet 2014
Lire sur le site Reporterre.net
«Les employés communaux y arrachent les mauvaises herbes à la main et un attelage sert de ramassage scolaire.» Danièle Fritsch, la cinquantaine, a posé ses cartons à Ungersheim il y a deux ans et n’est pas prête d’oublier ses premières impressions.
Penser écologie, réaliser économie
Peuplé de 2087 habitants, ce village près de Mulhouse, ressemble à tous ceux du péri-urbain alsacien. Des maisons avec jardins, une salle de sport, une place centrale où trône l’église. Il faut y vivre pour se rendre compte qu’Ungersheim n’est pas un village comme les autres.
Depuis 2011, la commune suit le mouvement des villes en transition. Elle a défini vingt-et-un projets pour penser «l’après-pétrole». Ils s’appuient sur trois piliers de réflexion avec pour maître mot l’«autonomie» : alimentaire, énergétique et intellectuelle.
Dernière réalisation en date : une centrale photovoltaïque avec quarante mille mètres carré de capteurs solaires. De quoi produire en électricité l’équivalent de ce que consomment dix-mille habitants par an. Ungersheim a su profiter de la mise en vente des friches industrielles des anciennes mines de potasse pour acquérir le terrain sur lequel une entreprise privée investit.
La commune bénéficie du loyer payé par l’investisseur. À Ungersheim, l’écologie accompagne les projets d’avenirs. «Je pense écologie, je réalise économie», se targue le maire Jean-Claude Mensch.
Un méthaniseur devrait à l’avenir compléter l’installation énergétique alors que la piscine municipale chauffe déjà ses bassins au solaire thermique. Affichée mais pas véritablement recherchée, l’autonomie énergétique est un prétexte pour faire du village une «vitrine des énergies renouvelables» selon le maire. À une vingtaine de kilomètres de la plus vieille centrale nucléaire de France, Fessenheim, il ne prétend pas «révolutionner le monde mais ouvrir des voies».
Bio et local
Ouvrir la voie, Richelieu le fait concrètement tous les jours. Le cheval de la commune est un employé municipal comme les autres : il aide à arroser les fleurs, labourer le jardin communal et sert de transport scolaire. «C’est un moyen de sensibilisation essentiel», explique Jean-Claude Mensch.
Pas de progrès sans pédagogie. Les enfants scolarisés à Ungersheim mangent bio à la cantine. La filière appelée «de la graine à l’assiette» crée un circuit local d’approvisionnement alimentaire. Le jardin communal alimente aussi des paniers de légumes bio accessibles à toute la population.
À la mairie, un large plan trace l’architecture de la future Maison des natures et des cultures. En forme d’hémicycle, «le bâtiment sera équipé d’une conserverie et d’une malterie», décrit le maire «et aussi d’un lieu d’activités pédagogiques».
Un tel projet ne se monte pas facilement : «Les caractéristiques du projet ne rentrent pas dans les cases des dossiers de subvention», déplore Jean-Claude Mensch. En lieu de mixité sociale et générationnelle, ce projet est emblématique d’une des priorités du village en transition : «Créer du lien», insiste le maire.
«Le village comptait sept restaurants pour 1200 âmes, se souvient-t-il. Avec plus de 2000 habitants aujourd’hui, il n’en compte plus que trois.» «Face à la proche zone commerciale, les petits commerçants ne peuvent pas résister», témoigne Jacques, gérant d’un bar-restaurant. La quincaillerie sur la place centrale du village a aussi disparu.
Une idée pour relocaliser l’économie ? Le «radis», une monnaie locale. Lancée le 13 juillet dernier, elle permet aux habitants d’Ungersheim de payer leurs achats dans neuf commerces du village qui l’ont adoptée. Trois radis dans la caisse de la boulangère, une dizaine dans celle de la coiffeuse... «Il n’y a pas un engouement fou mais ça participe de la sensibilisation pour la relocalisation», concède Jean-Claude Mensch.
Démocratie participative
En relocalisant l’économie, le maire souhaite renforcer les liens sociaux au sein de sa commune, «où l’esprit de solidarité manque», d’après Carole, la coiffeuse. Le projet d’éco-hameau, qui devrait aboutir d’ici deux ans, incarne ce souhait. Il regroupe des personnes volontaires pour financer et concevoir ensemble une habitation écologique.
«Les idées doivent émaner de la population», souligne le maire. Il a pour cela introduit un conseil participatif. Une quarantaine d’Ungersheimois auxquels le conseil municipal soumet ses propositions. «C’est peu, sur 2000 habitants, mais ça a le mérite d’exister», souligne le maire.
«Il faut être volontaire, rien n’est obligatoire», fait remarquer Julien Rousseau, au conseil municipal depuis six ans. A 33 ans, le conseiller reconnaît que les moins de vingt ans manquent au conseil. Pas besoin non plus d’appartenir à un parti politique. Ni l’opposition ni le maire ne portent d’étiquette.
«L’écologie politique n’est pas assez pragmatique», regrette-t-il avant d’afficher sa priorité : «Améliorer la vie de la population dans un environnement sain.»
Par Marion Paquet (WE Demain) - 25 juillet 2014
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