Victoire pour les travailleurs de la Deustche Post !
Alors qu’Angela Merkel est bien occupée à imposer la rigueur austéritaire au mauvais élève Grec de l’Union Européenne, c’est au sein de ses propres frontières que certains, de plus en plus nombreux semble-t-il, se mobilisenti pour défendre leurs emplois et leurs conditions de travail. Aujourd’hui, ce sont les postiers de la Deutsche Post, privatisée en 1996, qui ont arraché une victoire malgré l’intransigeance de leur patron et les différentes tentatives de trahison de la bureaucratie syndicale.
Aucun licenciement économique pour les 140.000 agents de tri et distribution du courrier et des paquets jusqu’à fin 2019, pas de mise en place de sous-traitance de ces activités par des entreprises externes, augmentations de salaires par paliers, à commencer par une prime de 400 euros par personne au 1er octobre prochain. Voilà le fruit des quatre semaines de grèves ayant mobilisé plus de 20 000 facteurs. Et si certaines de leurs revendications, telle la réduction de la journée de travail de 38,5 heures à 36 au même salaire, n’ont pas été accordées, cet accord montre tout de même une détermination payante du côté des travailleurs de la poste allemande.

Lutte et embûches

La Deutsche Post est l’une des entreprises « championnes » d’Allemagne. Avec 1,3 milliards euros de bénéfices en 2014, et une production quintuplée depuis 2008, elle fait partie des entreprises aux plus gros revenus du pays. La recette miracle ? Réduction des salaires et augmentation des gains pour les actionnaires, dont l’Etat, avec 21% des parts, est l’un des plus gros. Pourtant, pas question de concéder quoique ce soit à ceux qui génèrent ces gains. Refus des négociations, interdiction de l’action légale du syndicat par le tribunal de travail de Bonn, remplacement des grévistes par des travailleurs venus de Pologne : tout un arsenal répressif a été déployé par la direction de l’entreprise et cautionné par l’Etat pour mater la détermination des travailleurs.

Quant aux directions syndicales de Verdi, il ne faut surtout pas compter sur elles pour mener la grève à la victoire. Alors que la Deutsche Post représente un sacré bastion syndical, avec 80% de syndicalisation interne, la direction de Verdi n’est pas habituée à mobiliser le secteur. Peut-être que le fait que Andrea Koscis, principal négociateur du syndicat, soit également le vice-président de l’équipe de direction de l’entreprise, n’y est pas pour rien. Et si la grève leur a finalement été imposée par la base, motivée par l’ampleur des attaques patronales et s’étendant rapidement, la direction de Verdi avait, à la veille du début de la grève reconductible, tenté un dernier gros coup de traitre : une contre-proposition à la direction de la boîte, abandonnant l’essentiel des revendications, notamment la réduction du temps de travail, et refusant de demander une amélioration des conditions de travail en échange d’un engagement de l’entreprise à ne pas changer les contrats collectifs des 6 000 employés en sous-traitance.

Bureaucraties syndicales VS solidarité des travailleurs

La direction syndicale de Verdi s’est ainsi clairement imposée comme obstacle pour mener à bien la grève. Et face à cette bureaucratie, une des faiblesses du mouvement a été l’absence de développement de secteurs combatifs capables de constituer une alternative à la politique des directions syndicales, qui ont tout fait pour canaliser le mouvement, une alternative pouvant notamment se lier à d’autres secteurs en lutte comme c’est le cas actuellement pour beaucoup en Allemagne.
Au cours de leur lutte, les facteurs de la Deutsche Post ont bénéficié du soutien essentiel de la population ainsi que des travailleurs d’Amazon, en lutte depuis 3 ans, et de DHL. S’ils avaient en plus rejoint les collègues instituteurs et travailleurs sociaux également en lutte contre la précarisation de leur travail, ceux de la Charité, le plus grand hôpital d’Europe, ceux du secteur commercial contre les différences salarialesi, ce n’est pas seulement une victoire à court terme qu’ils auraient pu espérer, pansant les plaies d’une blessure bien plus profonde. C’est un mouvement aux allures sensiblement politiques qui se serait initié face au gouvernement Merkel, au service du grand patronat allemand, s’appuyant pour cela sur l’ensemble des loi anti ouvrières et notamment les réformes Hartz qui ont détricoté le droit du travail au début des années 2000 . La victoire des facteurs de la Deutsche Post montre qu’il est possible de faire reculer la direction de la Deustche Post aussi impitoyable soit-elle. Mais elle n’est qu’un premier pas dans la bataille que les travailleurs ont à mener contre ce système capitaliste basé sur l’exploitation, qui ne cesse de faire payer sa crise aux travailleurs.

Par Aglaé Martin

Lire sur Révolution Permanente (08/07/2015)