Le Parlement européen approuve l'évolution vers une pêche durable
Une majorité pareille a surpris tout le monde. Par 502 voix pour, 137 voix contre et 27 abstentions, les députés européens réunis à Strasbourg ont adopté, mercredi 6 février, les fondements d'une politique commune de pêche désireuse de lutter contre la surpêche.
Est-ce parce qu'il se prononçait pour la première fois sur ce thème ou bien faut-il y voir le résultat d'un long travail de lobbying des ONG ? Le Parlement européen s'est en tout cas laissé séduire par l'esprit de cette réforme qui affiche sa volonté de stopper le déclin des populations de poissons tout en freinant la dégringolade des emplois dans le secteur de la pêche.

Les députés ont approuvé le principe de ne plus outrepasser des quotas au-delà desquels on empêche les stocks de poisson de se reconstituer et de respecter au contraire les rendements maximum durable (RMD). Ils ont voté aussi l'interdiction de rejeter par-dessus bord les prises non voulues, soit parce qu'elles n'entrent pas dans les quotas autorisés, soit qu'elles appartiennent à une espèce non commercialisée. Ce sont deux des trois principales propositions défendues depuis un an et demi par la commissaire européenne à la pêche, Maria Damanaki.

DÉCEPTION FRANÇAISE

Côté français, la socialiste Isabelle Thomas comme son homologue du Parti populaire européen Alain Cadec ont exprimé chacun de leur côté leur déception face à ce vote. Tous deux espéraient renvoyer les deux grands chapitres de la réforme à plus tard, reflétant ainsi la position du gouvernement. Or le Parlement de Strasbourg a décidé de revoir à la baisse les quotas de pêche à partir de 2015 afin d'atteindre un niveau de renouvellement "au-delà" du RMD dès 2020. Une décision inapplicable, alors "que l'Union européenne ne dispose pas à ce jour de la moitié des données sur ses stocks halieutiques", a commenté Mme Thomas.

Quant à l'interdiction des rejets, les députés sont favorables à sa mise en place entre 2014 et 2017 selon les espèces. "Cette mesure est en l'état dogmatique, voire populiste", a protesté M. Cadec. Une fois débarqués au port, les spécimens aujourd'hui rejetés en mer vont pouvoir alimenter une filière de farine de poissons pour l'alimentation animale, au risque de développer cette pêche a priori "accidentelle", font remarquer les détracteurs de cette nouvelle façon de procéder.

Il n'empêche, les ONG et les écologistes, qui voient dans cette décision du Parlement l'expression de la société civile sur l'enjeu de la pêche, multiplient les communiqués de triomphe. Greenpeace se réjouit particulièrement de deux amendements qui lient l'accès aux zones de pêche à des critères de durabilité (respect de la ressource halieutique, nombre d'emplois).

Avec une majorité aussi indiscutable, les représentants du Parlement européen vont pouvoir aborder la prochaine étape avec une forte légitimité. Les nouvelles procédures européennes prévoient en effet des discussions tripartites avec la Commission européenne et le conseil des ministres de la pêche.

Lire sur le site LeMonde.fr