03 Nov 2021
Attaquées en diffamation par l’opérateur minier Trajan, la Compagnie des guides de Guyane et l’association Maiouri Nature Guyane ont obtenu gain de cause devant la justice. Elles étaient poursuivies pour diffamation par la compagnie minière après avoir rendu publiques les images de la pollution dont elle était responsable. Le 11 mars, le tribunal correctionnel de Cayenne a reconnu la bonne foi de leurs présidents respectifs et confirmé que ceux-ci n’avaient pas abusé de leur liberté d’expression. C’est une victoire démocratique pour les opposants aux exploitations aurifères, inquiets de la multiplication des projets miniers dans cette région.
L’expansion des extractivistes miniers
Pour comprendre ce qui a poussé Trajan, une société spécialisée dans l’extraction de minerais et de métaux, l’or en particulier, à porter plainte contre deux petites associations locales, il faut remonter jusqu’à 2018.
En octobre de cette année-là, la préfecture de Cayenne autorise l’opérateur privé à exploiter une mine aurifère de type alluvionnaire, située sur la crique Nelson, une rivière en amont du fleuve Kourou, qui traverse la forêt amazonienne avant de se jeter dans l’embouchure de la ville à laquelle il donne son nom.
Jadis épargnées par les chercheurs d’or grâce à quelques installations touristiques, les rives du Kourou attisent aujourd’hui maintes convoitises.
Après la réunion de la Commission départementale des mines de Guyane et la validation du dossier de Trajan, l’arrêté préfectoral est publié. Il s’agit d’une autorisation d’exploitation (AEX), pour une durée de quatre ans, d’un chantier d’un kilomètre carré sur la crique Nelson, avec obligation de réhabilitation du site, dont la déforestation est approuvée. Elle est signée Patrice Faure, ancien préfet de Guyane aujourd’hui rapatrié dans le Morbihan.
Rendu public, l’arrêté est aussitôt attaqué au tribunal administratif de Cayenne par plusieurs associations locales, dont la Compagnie des guides et Maiouri Nature. Au cours des débats en commission, ces dernières ont relevé de nombreux vices de procédure et des enfreintes aux Codes minier et de l’environnement.
Un : l’Office national des forêts, auquel la propriété du site est déléguée par l’État, a rendu un avis défavorable au projet d’AEX, dont la préfecture ne tient aucun compte.
Deux : l’arrêté ne mentionne pas la présence, en aval des chantiers, d’une aire de captage d’eau potable alimentant près d’un Guyanais sur trois. Le projet contrevient donc au principe de précaution et constitue une mise en danger directe de la santé publique.
Un recours est déposé au tribunal. « Dès le début, toutes les preuves étaient entre nos mains, nous explique Thomas Saunier, président de la Compagnie des guides de Guyane et opérateur touristique depuis plus de vingt ans. Mais les délais de la justice étant ce qu’ils sont, nous avons dû attendre un an avant de faire casser l’arrêté. »
Sans hésitation, l’opérateur Trajan envoie ses bulldozers et débute les travaux. Plusieurs associations déposent donc au tribunal administratif une demande de référé-suspension, procédure beaucoup plus rapide, mais qui ne se fonde que sur le caractère urgent ou non de l’annulation.
La requête est rejetée le 11 janvier 2019, car vice de forme ou non, le concessionnaire a rempli toutes les étapes réglementaires. Là, c’est le compte à rebours. Trajan a les coudées franches. Le défrichement commence.
Les associations se pourvoient au Conseil d’État, qui juge lui aussi leur recours inadmissible. Il n’y a plus qu’à attendre l’audience administrative et pendant ce temps, tout roule pour l’orpaillage légal. Le cours d’eau est détourné, les sols retournés, exit la forêt primaire.
Finalement, le 21 novembre 2019, l’audience a lieu. Le rapporteur public se prononce en faveur de l’annulation de l’arrêté préfectoral. Il retient avant tout l’argument du vice de procédure, l’absence d’accord écrit du gestionnaire du domaine public pour cette opération, à savoir l’ONF.
« Et le 12 décembre, c’est gagné ! raconte Thomas Saunier. Le tribunal oblige l’exploitant à partir et entérine une forme de jurisprudence pour l’orpaillage légal dans les zones proches du fleuve Kourou. »
Maigre soulagement… Car pendant que les recours volaient d’un continent à l’autre, les débats ont fait rage en Guyane et une nouvelle procédure a été engagée, cette fois-ci à l’encontre des associations.
Une procédure-bâillon
Le 11 septembre 2019, Gauthier Horth, opérateur minier et membre du KSOG (un lobby des orpailleurs guyanais), est l’invité de Radio Péyi. Au cours de cet entretien qu’on qualifierait volontiers d’aberrant, le lobbyiste vante les mines artisanales guyanaises comme « un modèle de développement durable » et s’en prend à ses contradicteurs.
Citant le cas controversé de la crique Nelson, il met alors « n’importe qui au défi de nous montrer qu’il y a eu 0,0001 % [sic] de changement sur la qualité de l’eau à Kourou ».
Il ne sait pas qu’en août, la Compagnie des guides et Maiouri Nature ont effectué des prélèvements d’eau en amont et en aval des chantiers et qu’ils les ont fait analyser par le laboratoire Hydreco, spécialiste local des évaluations environnementales.
Nos deux associations publient les résultats dans une courte vidéo (« Enquête en eaux troubles : intox(ication) des mines en Guyane »), qui prouve que la société Trajan n’a nullement respecté les seuils légaux de pollution.
En bref, le Schéma d’orientation minière de Guyane « impose à l’exploitant de travailler en circuit fermé en toute saison et fixe, pour les rejets [d’eau], un niveau de concentration de matières en suspension (MES) qui ne peut être supérieur à 35 mg/l ».
Quoi qu’il arrive, ce seuil ne doit pas être dépassé, sans quoi la biodiversité aquatique, ne pouvant plus respirer ou opérer de photosynthèse, dépérit. À cela s’ajoute une autre mesure, exigeant que l’eau rejetée par une exploitation ne soit pas polluée à plus de 25 % par rapport à la qualité initiale, en amont.
Quels sont les résultats ? En aval de la crique Nelson, le taux de MES atteignait 33 mg/l, juste en-deçà de la limite absolue, mais assez, selon le laboratoire, pour considérer « l’écosystème aquatique comme modifié ». En revanche, le ratio entre l’entrant et le sortant explosait tous les règlements et s’élevait à 619,18 %.
« L’eau en amont était translucide, l’eau en aval rouge et nauséabonde, se souvient Thomas Saunier, qui a lui-même effectué les prélèvements. Les orpailleurs n’avaient pas lavé l’eau comme ils le devaient et avaient pollué un écosystème précédant une aire de captage, aux dépens de la population. »
En novembre 2019, ulcérée par cette vidéo, la société Trajan dépose une plainte en diffamation publique contre la Compagnie des Guides et Maïouri Nature. Sur quels fondements ? Aucun.
Le tribunal correctionnel de Cayenne reconnaît un an plus tard que les associations et leurs présidents n’avaient pas abusé de leur liberté d’expression et, au regard du dossier, leur accorde le bénéfice de la bonne foi. Le 11 mars dernier, c’est donc la relaxe. Seconde victoire pour la société civile.
Ainsi perdue d’avance, une telle plainte ressemble étrangement à une poursuite-bâillon.
« C’est typique, explique Thomas Saunier. On ne cherche pas la condamnation, mais l’intimation, l’épuisement, le harcèlement psychologique et financier. Ce qui est un peu réussi : la présidente de Maïouri Nature a quitté son poste et l’ensemble des actions en justice nous ont coûté au moins 20 000 euros de frais. Mais malgré tout, moi, ça m’a donné des ailes ! »
Sur place, ces procédures ont permis aux associations de faire bloc contre l’orpaillage, d’entrer en relation avec des avocats renommés, d’être soutenues par de nombreux particuliers, qui ont financé les trois quarts des frais judiciaires.
La pollution écocidaire de l’activité minière
L’extraction d’or est l’industrie la plus polluante au monde. Pour sortir ce métal de terre et le rendre pur, les grands exploitants font usage de cyanure (150 tonnes par tonne d’or) et de soude caustique, qui ne peuvent avoir d’autre destin que de finir au moins en partie dans la nature.
Et ce n’est rien comparé aux dégâts des autres écoulements, du passage des machines, de l’électricité consommée, de la destruction des habitats et des espèces…
« Même le meilleur opérateur minier a un immense impact sur l’environnement, nous confie Thomas Saunier. La mine légale et artisanale, celle que cherche à développer l’État, est un modèle économique totalement incompatible avec la sauvegarde des écosystèmes, de la terre, et avec notre époque. »
Il y a aussi l’orpaillage illégal. Les « garimpeiros », orpailleurs clandestins venus des pays frontaliers comme le Brésil, seraient entre 6 000 et 10 000 à sévir dans les forêts guyanaises. Chaque année, ces groupes solitaires extrairaient plus de 10 tonnes d’or, soit un prix de revient de 500 millions d’euros, l’équivalent du budget de la collectivité territoriale de Guyane.
Il va sans dire que ces activités ont une incidence considérable sur la forêt : pour purifier l’or, les petits orpailleurs usent d’un procédé à base de mercure, alors que cet élément chimique est un contaminant global, sûrement le plus nocif pour tous les êtres vivants, sans distinction.
« Depuis des décennies, soupire notre interlocuteur, l’État les combat, mais il est incapable de gérer ce fléau. Ou plutôt il ne s’en donne pas les moyens matériels, juridiques et diplomatiques. C’est un viol permanent de la Guyane, perpétré par une mafia qui charrie avec elle des trafics d’armes, de stupéfiants et des réseaux de prostitution. »
L’orpaillage légal est souvent justifié, chez les services de l’État, par l’idée que la présence d’industries ou d’artisans en règle repousserait celle des orpailleurs clandestins. Thomas Saunier n’est pas de cet avis.
« C’est le contraire qui arrive ! Lorsqu’un minier légal s’implante quelque part, le message circule en forêt qu’il y a un gisement intéressant. Les illégaux accourent et s’installent tout autour de la concession pour accomplir leur œuvre. En tant que telle, l’AEX de la crique Nelson est surtout un aimant à clandestins. »
Légaux ou illégaux, si l’État français prolonge sa feuille de route, les orpailleurs ont donc de beaux jours devant eux.
Par Augustin Langlade (publié le 25/03/2021)
A lire sur le site La Relève et La Peste
L’expansion des extractivistes miniers
Pour comprendre ce qui a poussé Trajan, une société spécialisée dans l’extraction de minerais et de métaux, l’or en particulier, à porter plainte contre deux petites associations locales, il faut remonter jusqu’à 2018.
En octobre de cette année-là, la préfecture de Cayenne autorise l’opérateur privé à exploiter une mine aurifère de type alluvionnaire, située sur la crique Nelson, une rivière en amont du fleuve Kourou, qui traverse la forêt amazonienne avant de se jeter dans l’embouchure de la ville à laquelle il donne son nom.
Jadis épargnées par les chercheurs d’or grâce à quelques installations touristiques, les rives du Kourou attisent aujourd’hui maintes convoitises.
Après la réunion de la Commission départementale des mines de Guyane et la validation du dossier de Trajan, l’arrêté préfectoral est publié. Il s’agit d’une autorisation d’exploitation (AEX), pour une durée de quatre ans, d’un chantier d’un kilomètre carré sur la crique Nelson, avec obligation de réhabilitation du site, dont la déforestation est approuvée. Elle est signée Patrice Faure, ancien préfet de Guyane aujourd’hui rapatrié dans le Morbihan.
Rendu public, l’arrêté est aussitôt attaqué au tribunal administratif de Cayenne par plusieurs associations locales, dont la Compagnie des guides et Maiouri Nature. Au cours des débats en commission, ces dernières ont relevé de nombreux vices de procédure et des enfreintes aux Codes minier et de l’environnement.
Un : l’Office national des forêts, auquel la propriété du site est déléguée par l’État, a rendu un avis défavorable au projet d’AEX, dont la préfecture ne tient aucun compte.
Deux : l’arrêté ne mentionne pas la présence, en aval des chantiers, d’une aire de captage d’eau potable alimentant près d’un Guyanais sur trois. Le projet contrevient donc au principe de précaution et constitue une mise en danger directe de la santé publique.
Un recours est déposé au tribunal. « Dès le début, toutes les preuves étaient entre nos mains, nous explique Thomas Saunier, président de la Compagnie des guides de Guyane et opérateur touristique depuis plus de vingt ans. Mais les délais de la justice étant ce qu’ils sont, nous avons dû attendre un an avant de faire casser l’arrêté. »
Sans hésitation, l’opérateur Trajan envoie ses bulldozers et débute les travaux. Plusieurs associations déposent donc au tribunal administratif une demande de référé-suspension, procédure beaucoup plus rapide, mais qui ne se fonde que sur le caractère urgent ou non de l’annulation.
La requête est rejetée le 11 janvier 2019, car vice de forme ou non, le concessionnaire a rempli toutes les étapes réglementaires. Là, c’est le compte à rebours. Trajan a les coudées franches. Le défrichement commence.
Les associations se pourvoient au Conseil d’État, qui juge lui aussi leur recours inadmissible. Il n’y a plus qu’à attendre l’audience administrative et pendant ce temps, tout roule pour l’orpaillage légal. Le cours d’eau est détourné, les sols retournés, exit la forêt primaire.
Finalement, le 21 novembre 2019, l’audience a lieu. Le rapporteur public se prononce en faveur de l’annulation de l’arrêté préfectoral. Il retient avant tout l’argument du vice de procédure, l’absence d’accord écrit du gestionnaire du domaine public pour cette opération, à savoir l’ONF.
« Et le 12 décembre, c’est gagné ! raconte Thomas Saunier. Le tribunal oblige l’exploitant à partir et entérine une forme de jurisprudence pour l’orpaillage légal dans les zones proches du fleuve Kourou. »
Maigre soulagement… Car pendant que les recours volaient d’un continent à l’autre, les débats ont fait rage en Guyane et une nouvelle procédure a été engagée, cette fois-ci à l’encontre des associations.
Une procédure-bâillon
Le 11 septembre 2019, Gauthier Horth, opérateur minier et membre du KSOG (un lobby des orpailleurs guyanais), est l’invité de Radio Péyi. Au cours de cet entretien qu’on qualifierait volontiers d’aberrant, le lobbyiste vante les mines artisanales guyanaises comme « un modèle de développement durable » et s’en prend à ses contradicteurs.
Citant le cas controversé de la crique Nelson, il met alors « n’importe qui au défi de nous montrer qu’il y a eu 0,0001 % [sic] de changement sur la qualité de l’eau à Kourou ».
Il ne sait pas qu’en août, la Compagnie des guides et Maiouri Nature ont effectué des prélèvements d’eau en amont et en aval des chantiers et qu’ils les ont fait analyser par le laboratoire Hydreco, spécialiste local des évaluations environnementales.
Nos deux associations publient les résultats dans une courte vidéo (« Enquête en eaux troubles : intox(ication) des mines en Guyane »), qui prouve que la société Trajan n’a nullement respecté les seuils légaux de pollution.
En bref, le Schéma d’orientation minière de Guyane « impose à l’exploitant de travailler en circuit fermé en toute saison et fixe, pour les rejets [d’eau], un niveau de concentration de matières en suspension (MES) qui ne peut être supérieur à 35 mg/l ».
Quoi qu’il arrive, ce seuil ne doit pas être dépassé, sans quoi la biodiversité aquatique, ne pouvant plus respirer ou opérer de photosynthèse, dépérit. À cela s’ajoute une autre mesure, exigeant que l’eau rejetée par une exploitation ne soit pas polluée à plus de 25 % par rapport à la qualité initiale, en amont.
Quels sont les résultats ? En aval de la crique Nelson, le taux de MES atteignait 33 mg/l, juste en-deçà de la limite absolue, mais assez, selon le laboratoire, pour considérer « l’écosystème aquatique comme modifié ». En revanche, le ratio entre l’entrant et le sortant explosait tous les règlements et s’élevait à 619,18 %.
« L’eau en amont était translucide, l’eau en aval rouge et nauséabonde, se souvient Thomas Saunier, qui a lui-même effectué les prélèvements. Les orpailleurs n’avaient pas lavé l’eau comme ils le devaient et avaient pollué un écosystème précédant une aire de captage, aux dépens de la population. »
En novembre 2019, ulcérée par cette vidéo, la société Trajan dépose une plainte en diffamation publique contre la Compagnie des Guides et Maïouri Nature. Sur quels fondements ? Aucun.
Le tribunal correctionnel de Cayenne reconnaît un an plus tard que les associations et leurs présidents n’avaient pas abusé de leur liberté d’expression et, au regard du dossier, leur accorde le bénéfice de la bonne foi. Le 11 mars dernier, c’est donc la relaxe. Seconde victoire pour la société civile.
Ainsi perdue d’avance, une telle plainte ressemble étrangement à une poursuite-bâillon.
« C’est typique, explique Thomas Saunier. On ne cherche pas la condamnation, mais l’intimation, l’épuisement, le harcèlement psychologique et financier. Ce qui est un peu réussi : la présidente de Maïouri Nature a quitté son poste et l’ensemble des actions en justice nous ont coûté au moins 20 000 euros de frais. Mais malgré tout, moi, ça m’a donné des ailes ! »
Sur place, ces procédures ont permis aux associations de faire bloc contre l’orpaillage, d’entrer en relation avec des avocats renommés, d’être soutenues par de nombreux particuliers, qui ont financé les trois quarts des frais judiciaires.
La pollution écocidaire de l’activité minière
L’extraction d’or est l’industrie la plus polluante au monde. Pour sortir ce métal de terre et le rendre pur, les grands exploitants font usage de cyanure (150 tonnes par tonne d’or) et de soude caustique, qui ne peuvent avoir d’autre destin que de finir au moins en partie dans la nature.
Et ce n’est rien comparé aux dégâts des autres écoulements, du passage des machines, de l’électricité consommée, de la destruction des habitats et des espèces…
« Même le meilleur opérateur minier a un immense impact sur l’environnement, nous confie Thomas Saunier. La mine légale et artisanale, celle que cherche à développer l’État, est un modèle économique totalement incompatible avec la sauvegarde des écosystèmes, de la terre, et avec notre époque. »
Il y a aussi l’orpaillage illégal. Les « garimpeiros », orpailleurs clandestins venus des pays frontaliers comme le Brésil, seraient entre 6 000 et 10 000 à sévir dans les forêts guyanaises. Chaque année, ces groupes solitaires extrairaient plus de 10 tonnes d’or, soit un prix de revient de 500 millions d’euros, l’équivalent du budget de la collectivité territoriale de Guyane.
Il va sans dire que ces activités ont une incidence considérable sur la forêt : pour purifier l’or, les petits orpailleurs usent d’un procédé à base de mercure, alors que cet élément chimique est un contaminant global, sûrement le plus nocif pour tous les êtres vivants, sans distinction.
« Depuis des décennies, soupire notre interlocuteur, l’État les combat, mais il est incapable de gérer ce fléau. Ou plutôt il ne s’en donne pas les moyens matériels, juridiques et diplomatiques. C’est un viol permanent de la Guyane, perpétré par une mafia qui charrie avec elle des trafics d’armes, de stupéfiants et des réseaux de prostitution. »
L’orpaillage légal est souvent justifié, chez les services de l’État, par l’idée que la présence d’industries ou d’artisans en règle repousserait celle des orpailleurs clandestins. Thomas Saunier n’est pas de cet avis.
« C’est le contraire qui arrive ! Lorsqu’un minier légal s’implante quelque part, le message circule en forêt qu’il y a un gisement intéressant. Les illégaux accourent et s’installent tout autour de la concession pour accomplir leur œuvre. En tant que telle, l’AEX de la crique Nelson est surtout un aimant à clandestins. »
Légaux ou illégaux, si l’État français prolonge sa feuille de route, les orpailleurs ont donc de beaux jours devant eux.
Par Augustin Langlade (publié le 25/03/2021)
A lire sur le site La Relève et La Peste