05 Avr 2019
CHARRUE. Les chercheurs du collège d’agriculture de l’Université d’Illinois ont voulu en avoir le cœur net. Est-ce que les comparaisons entre méthodes de labours faites dans les fermes du Midwest sont aussi valables pour le reste du monde ? Les Etats-Unis sont en effet en train de se passer à grande vitesse du labour. Aujourd’hui, 1/3 des exploitations ne passent plus la charrue dans les champs. Outre les évidentes économies en fuel et en matériel, la technique s’est avérée extrêmement rentable. « Aider le sol à remplir ses fonctions permet de mieux faire pousser les récoltes tout en maintenant une haute qualité remplissant des buts écologiques, assure Stacy Zuber, principale auteure de l’article paru dans Soil biology and biochemistry. Dans l’Illinois, nous avons des sols très fertiles qui sont notre principale richesse. Les fermiers peuvent la protéger en s’assurant que la communauté microbienne est en bonne santé ».
La vie microbienne des sols, voilà le secret d’un sol fertile. Un gramme de sol contient un million d’espèces de bactéries, 100 000 espèces de champignons, 1000 espèces d’invertébrés (acariens, collemboles, nématodes, etc.) parmi lesquels les rois de ce milieu, les vers de terre, principaux acteurs de la fertilité des sols. Un sol sain compte une douzaine d’individus par m3. Ce microcosme aère le sol, décompose les résidus des végétaux et les transforme en matière organique de nouveau assimilable par les plantes. C’est ce recyclage qui est perturbé par le labour. Si le retournement des terres a un impact positif sur la vie bactérienne en provoquant la création de milieux de vie différents favorisant la multiplication des espèces, il stimule en revanche l’apparition de bactéries porteuses de maladies pour les plantes ! En outre, la charrue détruit le fragile réseau des mycéliums de champignons microscopiques qui aident les plantes à mieux capter la matière organique. Le semis direct quant à lui abaisse, certes, la diversité bactérienne, mais il favorise les espèces impliquées dans la fertilité, augmente la vitalité des champignons et améliore leur efficacité dans la dégradation de la matière organique.
Le non labour, supérieur partout dans le monde
GLOBAL. Stacy Zuber étaient cependant perturbées par le fait que si cette différence entre labour et non labour était toujours à l’avantage de ce dernier, les résultats américains variaient beaucoup d’une ferme à l’autre. En cause, les variations climatiques et pédologiques, mais aussi les différences de pratiques, comme le passage de herses pour un travail superficiel du sol, l’utilisation ou pas de pesticides, ou la pratique du semis direct sous couvert pérenne comme font les tenants de l’agriculture de conservation. «Une méta-analyse nous a permis de regarder les différents champs d’études autour du monde pour vérifier s’il y a bien le même résultat partout, explique Stacy Zuber. Cette méthode nous a permis d’avoir une vue globale ». Résultat : partout, les sols sous labour ont une activité et une masse microbienne ainsi qu’une activité enzymatique bien inférieure aux sols non labourés.
Ce résultat ne surprendra pas les chercheurs de l’Inra Dijon qui étudient ces écosystèmes microbiens. Ces chercheurs ont fondé en 2001 un réseau de la mesure de la qualité des sols quadrillant le territoire français. En établissant une moyenne de vie bactérienne exprimée en microgramme d’ADN présents dans un gramme, la plateforme Genosol est désormais capable de hiérarchiser les terres les plus riches et d’informer ainsi les agriculteurs sur la fertilité réelle de leur terre. De même, un sol riche en matière organique capte beaucoup plus de CO2 atmosphérique. D’où l’idée de faire de l’amélioration biologique des champs cultivés un moyen de lutte contre le réchauffement climatique. Lancé lors de la COP 21 à Paris en décembre dernier, le programme "4 pour 1000" vise ainsi à promouvoir toutes les techniques améliorant la fertilité des sols. Dont –comme vient de le prouver les chercheurs de l’Université de l’Illinois– le non labour des terres.
Par Loïc Chauveau (publié le 09/10/2016)
A lire sur le site Sciences et Avenir
La vie microbienne des sols, voilà le secret d’un sol fertile. Un gramme de sol contient un million d’espèces de bactéries, 100 000 espèces de champignons, 1000 espèces d’invertébrés (acariens, collemboles, nématodes, etc.) parmi lesquels les rois de ce milieu, les vers de terre, principaux acteurs de la fertilité des sols. Un sol sain compte une douzaine d’individus par m3. Ce microcosme aère le sol, décompose les résidus des végétaux et les transforme en matière organique de nouveau assimilable par les plantes. C’est ce recyclage qui est perturbé par le labour. Si le retournement des terres a un impact positif sur la vie bactérienne en provoquant la création de milieux de vie différents favorisant la multiplication des espèces, il stimule en revanche l’apparition de bactéries porteuses de maladies pour les plantes ! En outre, la charrue détruit le fragile réseau des mycéliums de champignons microscopiques qui aident les plantes à mieux capter la matière organique. Le semis direct quant à lui abaisse, certes, la diversité bactérienne, mais il favorise les espèces impliquées dans la fertilité, augmente la vitalité des champignons et améliore leur efficacité dans la dégradation de la matière organique.
Le non labour, supérieur partout dans le monde
GLOBAL. Stacy Zuber étaient cependant perturbées par le fait que si cette différence entre labour et non labour était toujours à l’avantage de ce dernier, les résultats américains variaient beaucoup d’une ferme à l’autre. En cause, les variations climatiques et pédologiques, mais aussi les différences de pratiques, comme le passage de herses pour un travail superficiel du sol, l’utilisation ou pas de pesticides, ou la pratique du semis direct sous couvert pérenne comme font les tenants de l’agriculture de conservation. «Une méta-analyse nous a permis de regarder les différents champs d’études autour du monde pour vérifier s’il y a bien le même résultat partout, explique Stacy Zuber. Cette méthode nous a permis d’avoir une vue globale ». Résultat : partout, les sols sous labour ont une activité et une masse microbienne ainsi qu’une activité enzymatique bien inférieure aux sols non labourés.
Ce résultat ne surprendra pas les chercheurs de l’Inra Dijon qui étudient ces écosystèmes microbiens. Ces chercheurs ont fondé en 2001 un réseau de la mesure de la qualité des sols quadrillant le territoire français. En établissant une moyenne de vie bactérienne exprimée en microgramme d’ADN présents dans un gramme, la plateforme Genosol est désormais capable de hiérarchiser les terres les plus riches et d’informer ainsi les agriculteurs sur la fertilité réelle de leur terre. De même, un sol riche en matière organique capte beaucoup plus de CO2 atmosphérique. D’où l’idée de faire de l’amélioration biologique des champs cultivés un moyen de lutte contre le réchauffement climatique. Lancé lors de la COP 21 à Paris en décembre dernier, le programme "4 pour 1000" vise ainsi à promouvoir toutes les techniques améliorant la fertilité des sols. Dont –comme vient de le prouver les chercheurs de l’Université de l’Illinois– le non labour des terres.
Par Loïc Chauveau (publié le 09/10/2016)
A lire sur le site Sciences et Avenir