La reconnaissance du crime « viol conjugal » fait son chemin. La cour d’appel d’El Jadida donne un coup de pouce à la cause féminine.
En ce mercredi 5 juin, la Cour d’appel d’El Jadida écrit une page jurisprudentielle sans précédent dans le monde arabe. Le juge a en effet prononcé un jugement pour viol conjugal, formulé sous couvert d’agression.
L’inculpé, un homme de 42 ans, fqih de son état, est condamné à 2 ans de prison pour abus et agression sexuels sur son épouse de 35 ans. « C’est la première fois au Maroc qu’une telle décision est prise par une juridiction nationale. Le juge a estimé que l’acte sexuel a été exercé d’une manière anormale », explique Me Abdessalam El Mrini, avocat de la victime, inscrit au barreau d’El Jadida.
Une plainte en décembre 2012
Le 22 décembre 2012, les services de la gendarmerie royale de la ville d’El Jadida enregistrent une plainte. Une femme mariée depuis 11 ans dépose plainte contre son mari pour agression sexuelle. Elle est accompagnée par des membres de l’association féminine Essanaa, qui lutte, depuis 1999, pour la protection des femmes à El Jadida.
Le 2 janvier 2012, le procureur général s’empare de l’affaire et décide de la poursuite de l’accusé. « C’est exceptionnel en soi, que le procureur juge de l’opportunité des poursuites avec autant de célérité dans une affaire pareille », ne manque pas souligner Me El Mrini. En effet, l’époux est rapidement mis en détention.
Les preuves de l’accusation
Ce sont, tout d’abord, des attestations médicales édifiantes. Des arguments médicaux qui prouvent la sodomie : une fissure anale large provoquant une maladie hémorroïdaire. « L’expertise médicale parle même de douleur rien qu’au toucher rectal », relate l’avocat de la défense.
Ensuite, un témoignage poignant, celui de l’une des filles des trois enfants du couple. Une fillette de 11 ans qui raconte devant une cour et une assistance sous le choc, les sévices subis par sa mère, sous ses yeux.
Une scène. Le père traînant la mère par les cheveux la couchant à même le sol. Les enfants sont présents dans la même pièce. Et le père ordonne à la mère de se soumettre à sa volonté.
Le fondement du plaidoyer
L’article 485 du Code pénal a servi de base à cet arrêt de la Cour d’appel d’El Jadida. Il énonce qu’« est puni d’une réclusion de 5 à 10 ans tout attentat à la pudeur consommé ou tenté avec violences contre des personnes de l’un ou de l’autre sexe ».
Ne disposant de texte juridique prévoyant l’agression sexuelle dans le cadre du mariage, le juge a donc appliqué cette disposition. Dans quelques jours, nous saurons si l’accusé fera appel de ce jugement.